Version française / please read in English below
Cette semaine, j'ai réorganisé un vieux disque dur et je suis tombé sur un livre blanc que j'ai écrit en 2021. Il s'agit en quelque sorte d'une première collection d'idées menant à mon concept toujours en évolution de "l'enseignement par la créativité".
Pendant les crises sanitaires de 2020, j'ai lancé un blog (qui est devenu plus tard cette newsletter) comme outil pour mieux échanger avec mon équipe et mon réseau. Pour penser librement et en dehors d’un contexte de bureau. J'ai toujours écouté et réfléchi aux idées et aux expériences de mes collègues. Le blog a élargi cette possibilité.
J'ai également commencé à publier des conversations ou des entretiens mensuels portant sur une variété de pensées et sur les personnes qui les expriment (ce qui est devenu plus tard le "thoughtleaders" podcast). Les questions, conclusions et résultats de cette quête font désormais partie de mon travail, de ma prise de décision et ont profondément influencé le document mentionné. J'aimerais en partager certaines parties dans les prochaines newsletters, car elles soulèvent des questions toujours pertinentes sur l'enseignement supérieur contemporain !
Une école de la confiance
La base la plus importante pour que la créativité fonctionne est une culture de la confiance. Aucune des discussions, échanges et collaborations nécessaires entre les étudiants, le corps enseignant et l'administration ne pourra avoir lieu ou conduire à des changements sans l'existence d'une véritable confiance.
Pour commencer d'un point de vue théorique, transposons les recherches de Frances Frei et Anne Morriss sur la "Confiance dans le Leadership" au secteur de l'enseignement supérieur : Les deux professeures d’Harvard démontrent que la confiance n'est pas abstraite, monolithique ou très difficile à établir. Leur recherche de 2020 montre qu'elle est toujours basée sur trois éléments imbriqués les uns dans les autres : L'authenticité, la logique et l'empathie. Chacun de ces éléments peut être mis en œuvre de manière singulière.
Qu'est-ce que cela signifie pour une école ou une université ?
Dans un environnement d'enseignement et d'apprentissage, cela signifie que les enseignants doivent assurer deux aspects différents de l'authenticité. Tout d'abord, ils doivent être "auto-authentiques", être vrais, réels et transparents. Deuxièmement, ils doivent également laisser les étudiants être eux-mêmes et aussi authentiques qu'ils le souhaitent, afin de créer un espace totalement inclusif.
Comme nous l'avons mentionné, les enseignants doivent être crédibles pour être authentiques. Malheureusement, cela les amène souvent à se situer entre être “perdus dans la logique (lost in logic)" et "perdus dans la traduction (lost in translation)":
D'un côté, un prof peut ne pas être très logique et rigoureux, mais être capable de raconter une histoire étonnante. Un vrai conteur avec une présence scénique, créant d'excellentes expériences académiques !
D'autre part, il peut avoir une logique très solide et rigoureuse, mais a du mal à communiquer clairement. Une personne étonnante, très bien informée, mais dont le spectre d'interaction est très faible…
Enseignement et design thinking
Ces deux situations rendent l'enseignement suspect, voire trop souvent inefficace. Comme l'écrivait en 1947 mon héros Moholy-Nagy du Bauhaus, le design se définit par l'ingéniosité et l'inventivité. En appliquant cette définition à l'éducation, on pourrait affirmer qu'une expérience d'apprentissage attrayante et solide sur le plan académique existe grâce à la substance (la logique réelle) et au style (la narration de l'histoire).
Il est très difficile d'être empathique en tant qu'enseignant. Il faut être pleinement conscient et présent aux besoins des étudiants à tout moment, du moins en théorie. Le fait de devoir être multitâche entre les intérêts d'un étudiant et les siens (par exemple le portable, les perturbateurs, le rétroprojecteur qui ne marche pas etc.) remet immédiatement en question l'empathie envers l'autre, diminuant ainsi la confiance. Pour être un enseignant confiant et pleinement empathique, il peut être préférable d'être moins souvent "devant les étudiants", mais d'être présent à 100 % lorsqu'on est physiquement ou digitalement là.
La confiance mène à la transparence, à une compréhension différente de la hiérarchie et à de nouveaux objectifs d'apprentissage. Ces nouvelles perspectives nécessitent de nouvelles approches, d’une réorganisation. L'apprentissage par la créativité nécessite une culture de la confiance, car il s'agit d'aider les étudiants à développer leurs compétences les plus intimes et les plus humaines, où les profs et les étudiants s'engagent dans une écoute active, collaborent, sortent de leur zone de confort et sont ainsi plus confiants.
Ce n’est qu’un premier pas vers l'apprentissage (et l'enseignement) par la créativité, pas seulement à l'école ou à l'université, mais comme une expérience de toute une vie !
English version / Lisez la version française ci-dessus
This week I reorganized an old hard disc and stumbled upon a white paper I wrote in 2021. It is somehow a first collection of ideas leading to my still evolving concept of “teaching through creativity”.
During the sanitary crises in 2020, I started a blog (which later became this newsletter) as a tool to better exchange with my team and network. I have always naturally listened to and reflected on my colleagues’ ideas or experiences. The blog broadend that opportunity.
I also started to post monthly conversations or interviews focusing on a variety of thoughts and the individuals having them (which later became the thoughtleaders podcast). Questions, findings, as well as results of this quest are since part of my work, my decision making and have deeply informed the mentioned paper. I would like to share parts of it during the next few newsletters, as they raise still pertinent questions around contemporary higher education.
A school of trust
The most important foundation for creativity to work is a culture of trust. None of the needed discussions, exchanges and collaborations between students, faculty and administration will ever happen or lead to change without the existence of genuine trust.
To start from a theoretical point of view, let us transpose Frances Frei and Anne Morriss’ research on “trust in leadership” to the sector of higher education. The two professors demonstrate that trust isn’t abstract, monolithic or very difficult to establish. Their 2020 research shows that it is always based on three intertwined parts: Authenticity, Logic and Empathy. Each of those is singularly actionable.
What does that mean for a school or university?
In a academic teaching and learning environment, this means that tutors need to assure two different sides of authenticity. Firstly, they need to be “auto-authentic”, be true, real and transparent. Secondly, they also need to let students be themselves and as authentic as they come, to create a completely inclusive space.
As mentioned, tutors need to be credible, in order to be authentic. Unfortunately, this often brings them in a place between being “lost in logic” and being ”lost in translation”:
On one hand, a tutor may not be very logical and rigorous, but able to tell an amazing story. A real storyteller with a stage presence, creating excellent academic experiences!
On the other, the tutor may actually have a very sound and rigorous logic, but struggles to communicate it clearly. A amazing a very knowledgeable person with a very low interaction spectrum.
Teaching and design thinking
Both situations make teaching suspicious, too often even ineffective. As my hero Moholy-Nagy of the Bauhaus wrote in 1947, design is defined by resourcefulness and inventiveness. Applying this definition to education, one could state that an appealing and academically sound learning experience exists through substance (the real logic) and style (the story telling).
To be empathetic as a teacher is very hard. One needs to be fully aware and present to the needs of students at all times, at least in theory. Having to multitask between a student’s and one’s proper interests (eg. phone, overhead projector) immediately challenges empathy towards the other, therefore diminishing trust. To be a trustful and fully empathetic tutor, it may be better to “be in front of students“ less often, but to be present 100% when present.
Trust leads to transparency, a different understanding of hierarchy and new learning objectives. These changed perspectives require new approaches, a reorganization. Learning through Creativity needs a culture of trust, as it is about helping students to develop their most intimate and human skills, where tutors and students engage in active listening, collaborating, stepping outside their comfort zone, and being more confident.
This is a first step towards learning (and teaching) through creativity, not just in school or university, but as a lifelong experience!